Le code monétaire et financier prévoit dans son livre Ier au chapitre Ier (Le chèque, art. L131-1 à L131-87) du titre III que le créancier d’un chèque impayé pour défaut de provision peut se voir attribuer un titre exécutoire délivré par l’huissier de justice.
Cette disposition se trouvait avant dans la loi du 30 octobre 1935, modifiée par la loi n° 91-1382 du 30 décembre 1991, abrogée par l’ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 et désormais codifiée dans le code monétaire et financier. Le nouveau code monétaire et financier est apparu complètement à partir de l’année 2005. Le Code, qui compte près de mille trois cent articles, regroupe l’ensemble des dispositions législatives concernant la monnaie ainsi que les activités bancaires et financières.
La procédure de l’exécution forcée d’un chèque est détaillée à l´art. L131-73 du code monétaire et Financier:
Dans un premier temps, le créancier, qui se voit refuser le paiement de son chèque par la banque, obtient sur requête un certificat de non-paiement délivré par le tiré si «le chèque n’est pas payé dans un délai de trente jours à compter de sa première présentation dans le cas où celui-ci n’a pas été payé lors de sa seconde présentation ou à défaut de constitution de sa provision, pour en permettre le paiement dans le même délai ».
Ce certificat est ensuite notifié (cad adressé par lettre recommandé avec accusé de réception) ou signifié par l’huissier de justice au tireur. Ce courrier s’analyse en commandement de payer (Aufforderung zur Zahlung)
Si, ensuite, dans un délai de quinze jours, le chèque n’a toujours pas été payé, un titre exécutoire est délivré par l’huissier de justice sans aucune autre formalité.
Mais alors quoi faire lorsque le débiteur a son domicile en Allemagne ou bien lorsque son patrimoine se trouve en Allemagne?
La CJCE a décidé le 17 octobre 1999 dans l´affaire C-260/97 (Unibank A/S) que dès lors qu’il est procédé à l’exécution des actes relevant de l’article 50 de la convention de Bruxelles (qui est depuis le 1er mars 2002 remplacé par l’art. 57 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 (EuGVVO) pour presque tous les Etat membres de l’Union européenne) dans des conditions identiques à celle des décisions judiciaires, le caractère authentique de ces actes doit être établi de manière incontestable de telle façon que la juridiction de l’État requis soit en mesure de s’en remettre à l’authenticité de ceux-ci. Or, les actes établis entre particuliers ne possédant pas, par eux-mêmes, un tel caractère, l’intervention d’une autorité publique ou de toute autre autorité habilitée par l’État d’origine est, par conséquent, nécessaire pour leur conférer la qualité d’actes authentiques. Compte tenu de tout de ce qui précède, il convenait à la CJCE de répondre à la première question qu’un titre de créance exécutoire en vertu du droit de l’État d’origine dont l’authenticité n’a pas été établie par une autorité publique ou toute autre autorité habilitée à ce faire par cet État ne constitue pas un acte authentique au sens de l’article 50 de la convention de Bruxelles et son homologue dans le règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 (EuGVVO).
La Cour d’appel (CA) de Saarbrücken a considéré dans une décision du 6 juillet 1998, donc antérieure à celle de la CJCE précitée, qu’un tel titre délivré en France, bien qu’émis non contradictoirement et sans intervention judiciaire, était susceptible d’être reconnu et exécuté en Allemagne.
La CA de Saarbrücken a en effet analysé ce titre comme un document officiel (öffentliche Urkunde) rentrant donc dans le champ d’application de l’article 50 de la Convention de Bruxelles (aujourd’hui art. 57 de l’EuGVVO) et ne portant pas atteinte à l’ordre public allemand.
Selon cette décision, le « document officiel » au sens de l’article 50 de la Convention de Bruxelles n’a pas forcément une nature judiciaire. De plus, dans ce cas précis, peu importe qu’il n’y ait pas de débats oraux ou de procédure contradictoire : d’une part, le droit du défendeur à être entendu serait notamment respecté par la signification du certificat de non-paiement, d’autre part le défendeur disposerait de moyens de défense. Il est à noter que cette décision a été approuvé par la doctrine allemande, notamment Mr Reinmüller (cf. IPRax 2001, 207 et s.). En revanche la doctrine allemande (cf. Zöller/Geimer, ZPO, éd. 30, Art. 57 EuGVVO Rn. 1) refuse la reconnaissance des chèques italiens qui sont pourtant considérés comme des titres exécutoires en Italie (cf. art. 474 CPC italien).
Le créancier français muni d’un tel titre peut donc à bon droit entamer une procédure en vue de voir reconnaître son titre par l’apposition de la clause exécutoire (art. 38 et s. EuGVVO). Il doit s´adresser au tribunal de grande instance auprès du domicile du débiteur ou bien à défaut auprès du tribunal ou se trouvent les biens du débiteur. Le tribunal statue sans entendre le défendeur. La décision sera rendue sans débats oraux. Mais les parties ont un droit de recours contre la décision relative à la demande de déclaration constatant la force exécutoire. Lors de la première instance, le ministère d’avocat n’est d´ailleurs pas obligatoire. Si le demandeur n’a désigné dans sa requête aucun mandataire, alors toutes les notifications et significations lui seront adressées par voie postale (§ 183 du CPC allemand). Cette règle ne s’applique pas, lorsque le demandeur a désigné comme mandataire pour la procédure un avocat officiant auprès d’un tribunal allemand ou une autre personne. Le mandataire qui n’officie pas auprès d’un tribunal allemand doit avoir son domicile dans le ressort du tribunal saisi. L´exécution forcée en Allemagne suivra des règles du Code de procédure allemand.
Il convient d´ailleurs de noter qu´il n´est pas sûr que la procédure qui est prévue par l’art. L131-73 du code monétaire et financier pourra produire un titre exécutoire lorsque le tiré est situé en Allemagne. Bien que le droit du chèque en France et en Allemagne provienne de la même source (cf. Conventions de Genève) le droit allemand ne prévoit pas que le tiré soit obligé de procéder de la même manière qu´une banque française.
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